mardi 12 décembre 2017

Mazinger z infinity (Gekijôban maziger Z) réalisé par Junji Shimizu (2017)


Mazinger z infinity (Gekijôban maziger Z) réalisé par Junji Shimizu (2017)

Quand la nostalgie tue le film...

La nostalgie de l'époque (j'ai fait partie des premières "générations manga" avec Goldorak aka Grendizer - animation issue du même univers de l'auteur Go Nagaï - ou Candy et Albator Aka Harlock-) et un trailer assez punchy m'ont convaincu d'aller voir ce film.

Une interview de Go Nagaï et quelques articles publiés nous ont  appris que si Go Nagaï n'avait pas été associé de près à l'oeuvre, celle-ci avait été produite par des fans devenus adultes. Et ceci explique les défauts inhérents de cet animé, mais nous allons y revenir.

Un petit mot sur Go Nagaï : il est le père du robot géant directement piloté par un humain, c'est à dire du mécha comme on le comprend souvent ici (le terme a une signification plus vaste au Japon).

Passons d'abord aux points positifs : l'animation est magnifique. Tout en respectant les codes visuels de l'époque, la production a modernisé les dessins, créé une animation dynamique qui utilise la 3D de façon harmonieuse pour les combats de méchas.

Autre élément positif, l'histoire se déroule 10 ans après l'époque de la série d'origine : cela donne l'occasion aux auteurs de dérouler un rétrofutur alternatif assez intéressant dans les visuels, par exemple.

Malheureusement cela se gâte assez rapidement avec un scénario assez lourd, comportant de longues répliques où les personnages peuvent expliquer leurs choix [10 ans après], comme la volonté d'un des pilotes d'aller vivre dans un vieux quartier traditionnel où il se sent plus à l'aise. Laissant une grande place à ces longues scénettes, il ne se passe pas grand chose entre le prologue et la scène d'action finale. 

Tout ce passe comme si les créateurs avaient voulu, en grands fan boys, mettre en scène la vie future de leurs personnages favoris. Le film pêche aussi par la volonté des auteurs d'avoir voulu insérer le maximum de personnages* et monstres robotiques à l'écran (une centaine de kaijûs robotiques), ce qui le rend trop fouillis et nous déconnecte de tous les protagonistes.

L'idéal aurait été de faire une sorte de reboot modernisant le propos en gardant l'essentiel et quelques personnages emblématiques, mais la direction artistique prise de placer tous ces personnages nous donne 

Et le final part dans une sorte d'apothéose new age (sic). Assez décevant, mais à voir si vous êtes des quarantenaires nostalgiques.




* notamment le personnage comique de la série originelle avec son robot boite de conserve... Après le développement d'enjeux extrêmement sérieux, une scène avec lui jure énormément.

jeudi 30 novembre 2017

Le Japon en France sans le savoir : Les Mikados - ポッキかミカド?

Article issu du blog tabi.over-blog.com du 26/09/2007. A l'époque les friandises et gâteaux japonais n'étaient pas aussi connus et n'avaient pas l'exposition médiatique (sur youtube etc...) qu'ils ont aujourd'hui. Des sites comme umaibox ou candysan qui font de la vente en ligne de ces friandises nippones n'existaient pas non plus.

Mikado ou Pocky? Le Japon en France sans le savoir?

Certains objets ou produits de la vie courante ont parfois une origine inattendue. Ainsi, le saviez vous? Les mikado que vous dégustez parfois, ces délicieux biscuits en bâtonnets glacés de chocolat, sont d'origine japonaise (de la société Glico).

Leur nom d'origine est pocky (prononcez pok-ki). Ils seraient sortis la première fois sur le marché japonais en 1965 et leur succès ne se serait jamais démenti depuis : de nombreux goûts sont disponibles (glaçage à la fraise, amande, banane, lait...), et des éditions spéciales sont régulièrement proposées, à l'instar des kitkat.

Dans les années 80, ces biscuits apparaissent en France, produits par LU (titulaire de la licence Glico en Europe) sous le nom de Mikado. Actuellement 4 produits sont disponibles: chocolat noir, au lait, noisettes, et enfin caramel.

Cette semaine nous avons eu l'occasion de découvrir en supermarché une "édition spéciale zen - chocolat blanc". Serait-ce à l'instar du Japon le début d'une longue lignée de séries limitées ? 

[Les années suivantes nous prouveront le contraire]

Photos des "éditions spéciales" de 2007. Ces goûts deviendront standards. "Glico" apparaît juste en dessous de Lu.



 Un Pocky du Japon :


Quelques références : Un site en sommeil "Mazui", mais toujours existant, avec une série de Pockys. Ou le site de Color Lounge.

jeudi 9 novembre 2017

Kaiju daisenso_Invasion planète X (1965)


Nous sommes en pleine conquête de l'espace, entre le vol de Youri Gagarine en 1961 et le premier pas sur la lune en 1969. L'époque est optimisme devant les progrès de la technologie. Et Ishiro Honda se retrouve à nouveau aux commandes de son sixième godzilla, qui met en avant la conquête spatiale et la figure des inventeurs...

A l'occasion d'un progrès scientifique, la terre détecte une dixième nouvelle planète (Pluton est alors encore une planète), dénommée X et une expédition emmenée par le Japon est mise en place, pour découvrir une planète habitée et ravagée par un kaïju.

Les ixiens vont bientôt proposer d'emprunter aux terriens "leurs" godzilla et  afin de lutter contre, en échange d'une cure contre le cancer.

Sur un scénario assez étonnant pour un godzilla, les forces de la nature que représentent les kaïjus sont mises de côté jusqu'à la conclusion du film, pour se concentrer sur le secret qui entoure la planète x et les agissements de ses habitants. Nous nous trouvons ainsi et pour longtemps dans un film de SF d'époque avec son lot de mystères (*).

Quant au final, il amène l'idée que le contrôle des forces de la nature (kaïjus) ne peut qu'échouer et le retour à la normale passe par l'acceptation de celles-ci sur Terre :


Du côté du casting, et pour la mise en lumière internationale de ce voyage spatial, la présence d'un acteur anglais Nick Adams (l'astronaute Glenn) est à noter. Une première pour un film de la franchise, je crois.

Kumi Mizuno laissera également un souvenir durable pour les amateurs dans son personnage de Miss Namikawa :


En conclusion un bon godzilla de l'époque classique, assez étonnant dans sa forme.

* paranoïa et invasions. Ce film est toutefois précurseur de la série les envahisseurs.

mercredi 5 juillet 2017

Au Japon avec Théodore Monod




28 décembre 2007 : un article apparaît sur un ancien blogue (tabi sur over-blog) alors que je m'apprête à partir pour le Japon via l'Autriche. Depuis, beaucoup de changements ont eu lieu et la compagnie, Austria Airlines, ne dessert plus le Japon.
Cet article est un peu périphérique au Japon, mais il a sa place ici (05/07/2017)

La "magie" du blog internet est de pouvoir écrire à l'avance ses notes et les sortir en pilotage automatique. Je serais donc dans l'avion au moment où ces lignes apparaîtront.

Dans mon sac se trouvent toujours une revue sur le cinéma et un livre acheté pour l'occasion quelques jours auparavant : Il est des habitudes qui naissent et créer des rites signifiants pour soi-même.
 
Plus que l'utilité pour le voyage - il n'est pas dit que soit trouvé le temps pour une lecture pendant cette brève halte au pays du soleil levant - il s'agit avant tout de marquer le Départ.

Ainsi, j'emporte "Pèlerin du Désert" de Théodore Monod : ce livre avait été trouvé dans une librairie d'occasion après l'achat des billets d'avions pour le Japon. Il me semblait porteur de sens de ne l'ouvrir que lors d'un départ.

Pourquoi ce livre? Je pense en avoir entendu parler sur un autre site : Théodore Monod serait de cet esprit nomade, riche de réflexion en ces temps où le repli sur soi apparaît si séduisant chez certains ...

A l'arrivée, je prendrais au distributeur une bouteille en plastique de thé vert amer et sans sucre. Comme toujours. Il est des habitudes...

@ bientôt

samedi 1 juillet 2017

Natsume no yûjinchô - le livre des amis de Natsume, série animée



Synopsis (wiki) : Natsume est capable de voir les yôkai et les ayakashi (esprits surnaturels japonais) alors que son entourage ne les perçoit pas. Petit, il ne les appréciait pas particulièrement car les apparitions avaient tendance à le placer dans des situations embarrassantes, voire dangereuses et le conduisaient à des comportements que les humains normaux ne peuvent comprendre. Catégorisé comme « bizarre », l'orphelin est solitaire, rejeté par les autres enfants et passe de famille d'accueil en famille d'accueil. À la suite d'un énième déménagement, de nombreux yôkai se mettent à le pourchasser sans qu’il ne comprenne pourquoi. En tentant de fuir une attaque, il pénètre un jour dans un lieu sacré et libère par inadvertance Madara, un « chat » qui avait été piégé là. Cette rencontre amène Natsume à découvrir l'héritage de sa grand-mère Reiko, le « Livre des amis », un carnet contenant les noms de nombreux esprits qui confère alors le pouvoir de contrôler ces derniers. Dépassant la peur et de l'incompréhension, Natsume tisse des liens de respect et d'amitiés avec certains yôkai et se met en quête de « rendre » leur nom aux esprits piégés. Madara décide d'accompagner le garçon, en tant que sensei et garde du corps. Mais alors que pour une fois, Natsume sort de l'isolement et se lie avec sa famille d'accueil et ses camarades de classe, il découvre qu'il est parfois difficile d'entretenir conjointement des relations d'amitiés avec des esprits et des humains…
Natsume no yûjinchô - littéralement le livre des amis de Natsume, série animée adaptée du manga éponyme édité en France sous le titre "Le Pacte des Yôkai".


Il y a longtemps, j'étais tombé sur une enquête d'opinion auprès des spectateurs japonais : ils devaient répondre à la question "quels anime voudriez vous conseiller aux étrangers?". Les réponses présentées sous forme de liste contenaient une oeuvre assez peu popularisée ici : Natsume no Yûjinchô, littéralement le livre des amis de Natsume. Et pourtant, quelle série formidable... 

La désaffection relative vient peut-être d'une porosité incomplète de la transmission de la culture japonaise populaire : certains animés spectaculaires obtiennent plus d'audience que d'autres à la trame de fond fondamentalement japonaise.


En effet, Natsume Yûjin chô illustre profondément cette notion du lien entre les choses et les gens (tsunagari) que l'on retrouve également dans le film à succès "kimi no na ha" et de l'adage japonais "ichigo ichie" [un temps, une rencontre]. 



*****

Comme le synopsis l'indique, Natsume a la capacité de voir "les yokais" (tous les humains ne le peuvent pas), et donc d'interpréter le monde, la nature (auxquels les humains participent) à travers ses liens (les yokais sont souvent reliés à une chose, ou un principe).


Autrefois enfant ignorant et solitaire, ballotté de famille d'accueil en famille d'accueil, Il est bientôt reçu et accepté par des parents lointains et peut ainsi faire l'apprentissage progressif de la socialisation au lycée et de ses capacités particulières, tout en créant des relations d'amitiés avec certains yokais et humains.





Il reçoit aussi en héritage de sa grand mère (il ne l'a pas connue, sans parler de ses parents) ce fameux livre des amis, qui contient le vrai nom, donc un certain pouvoir, sur certains yokais. En rendant leur nom à ces yokais il reçoit en retour des images et souvenirs des rencontres de ces êtres avec sa grand mère. Un nouveau lien se forme.


Profondément humaine, cette oeuvre prend la forme d'un conte philosophique de la place de l'Homme dans la nature, avec un profond sentiment de nostalgie. 

Quant à sa structure narrative, avec 6 saisons, Natsume yûjinchô est une série au long court qui se laisse découvrir pas à pas : chaque épisode est indépendant, ou presque (deux épisodes peuvent concerner la même histoire) et le monde avance par petite touches (avec l'évolution des personnages, l'apparition de nouveaux protagonistes...).

La musique instrumentale qui illustre des moments clés de la série, possède un côté charmant qui évoque des animations à l'ancienne et génère aussi une part de nostalgie.

En conclusion, Natsume yûjinchô est une série qui pourrait illustrer pour moi ce concept de mono no aware

* Concept spirituel et esthétique

vendredi 26 mai 2017

La cuillère d'argent, manga de Hiromu Arakawa



Silver Spoon (aka gin no saji) écrit par Hiromu Arakawa
Actuellement : 13 tomes parus (JP ou FR). En cours de publication.

Sans doute mon gros coup de coeur en manga "tranche de vie" depuis longtemps, Gin no saji est une oeuvre qui, sous une forme "innocente", pose avec bienveillance de nombreux questionnements sur le monde agricole.

Yûgo, est le cadet d'une famille au contexte particulier : son père est un homme austère et autoritaire qui mesure tout à l'aune de la réussite scolaire. Après un échec à l'entrée d'un lycée très côté, Yûgo décide d'entrer dans un lycée agricole du fin fond de Hokkaidô pour s'éloigner de la pression familiale et de celle des examens -les deux se confondant un peu -. 

A l'instar d'un candide citadin, il découvrira un monde qu'il ignore et tous ses questionnements et incertitudes : économiques, éthiques et philosophiques... Évitant l'écueil du "sur-place", l'auteur du manga fait évoluer les personnages et leurs relations, en même temps que le passage des saisons(au tome 13 nous sommes déjà en première) et Yûgo, lui même finit par se connaître et trouver le courage de commencer à s'affirmer face à son père.


A noter que l'oeuvre est adaptée en animé et en un film live.

mercredi 10 mai 2017

Instantané : Après la tempête réalisé par Kore Eda Hirokazu





 
Après la tempête (2016 au JP - umi yori ni mo mada fukaku ; encore plus profond que la mer) est le dernier film en date sorti dans nos contrées de mon réalisateur (et scénariste) japonais préféré : Kore Eda Hirokazu. 

Nous retrouvons l'auteur en forme, plus à l'aise dans une oeuvre personnelle qu'avec Notre petite sœur, adaptation d'un manga. 

Dans une approche quasi documentaire, il traite principalement de la famille dans tous ses états et sous divers éclairages, mais avec une bienveillance constante. 

Ici un père de famille irresponsable, joué par le toujours excellent Abe Hiroshi, qui ne gère pas très bien la séparation avec son ex-femme et son fils. La mise en lumière se fait sur les relations compliquées avec un membre d'une famille dont les défauts ne peuvent être pris en modèle.

Au casting nous retrouvons un peu "la famille Kore Eda" avec, en plus d'Abe Hiroshi, Kirin Kiki (également dans still walking...), Lily Franky (tel père, tel fils...)... A noter la présence de Satomi Kobayashi dont c'est -il me semble- la première apparition dans une des oeuvres du réalisateur (elle est connue pour Kamome Shokudo, notamment).

lundi 8 mai 2017

Instantanés mangas 08 Mai 2017

Les instantanés sont de courtes chroniques quand manquent de nombreuses choses dont le temps...



Une vie dans les marges de Yoshihiro TATSUMI (2 tomes imposants), aux exigentes éditions Cornelius, est une autobiographie d'un mangaka, témoignage rare et passionnant de l'évolution de ce genre, de ses techniques, de ses polémiques et de la société toute entière, de la fin de la guerre aux années 60. Il intéressera même les lecteurs plus portés sur l'histoire que le manga.



Dr DMAT (1 à 9 tomes) d'Akio KIKUCHI (dessin) et Hiroshi TAKANO (scénario) aux éditions Kazé relate les aventures d'une équipe mobile d'intervention médicale d'urgence, composée au moins d'un médecin (les secouristes au Japon sont légalement limités dans les soins qu'ils peuvent donner) et dont le but est de se déplacer sur le terrain lors de toute sorte de catastrophe. Bien que je ne sois pas spécialement amateur des séries médicales (mon intérêt s'est limité à deux ou trois saisons d'Urgences il y a fort longtemps), ce manga - avec son lot de pathos est relativement addictif. Il finit toutefois par lasser un peu vers les 3 derniers tomes.

dimanche 7 mai 2017

King kong contre godzilla (1962)



King Kong contre godzilla, sort en 1962 dans les salles japonaises dans un contexte bien différent du premier opus (1954*)  : avec une croissance économique favorable (jimmu boom 56-57, iwato boom 59-63), la reconstruction du Japon est achevée et le pays se prépare à recevoir les jeux olympiques dans quelques années (1964).

Pendant cette période, l'heure est à l'optimisme et la société japonaise autant que son paysage urbain, va être profondément modifiée avec pèle mêle la (re)découverte de la consommation et des médias, ce qui va influencer Honda Ishirô, de nouveau aux commandes de la réalisation du troisième opus de la franchise**.

A l'occasion du premier film en couleur du kaiju, Godzilla affronte King Kong, dont les droits d'utilisation ont été achetés par la Tōhō à la RKO Pictures***.

Honda continue de tracer ce qui fera l'ADN de la licence, avec une critique sociale et ce mélange de points de vues micro et macro alternés ou la difficile résistance humaine face à des forces qui dépassent l'entendement.

A cette époque, le Japon a pris de l'ampleur et les médias aussi. Ce qui est important est d'être amusant, intéressant, original, pour avoir un bon taux d'audience. Si l'audience suit, les sponsors suivront.. 

- Attention spoilers-
La première scène s'ouvre ainsi sur une émission scientifique sponsorisée par une société, "Pacific Pharmaceutics", dont le producteur déplore la baisse d'audimat (générant l'argent des réclames, fondement de la consommation).
Bien vite, le présentateur fait part de l'observation par un sous marin américain d'un phénomène étrange en Antarctique...

Une autre scène dévoile un repas en famille... Le Japon est tout à son bonheur retrouvé et son insouciance... Les gens sont désœuvrés et l'effroi se regarde par la petite lucarne : ainsi la scène de transition avec le tigre dans la TV est un régal.




Mais l'avidité va encore une fois faire courir le Japon (et le monde) à sa perte : cette course à l'audimat  incite le sponsor à financer une expédition TV vers l'océan indien, pour du sensationnel, suite à la rumeur de l'existence d'un animal géant.

Image d'une version remasterisée au Japon pour le blu ray

Et bientôt va émerger l'idée de mettre en présence les deux monstres sacrés... sans envisager que tout puisse mal tourner...

Sur un scénario plutôt intelligent dans son genre, le film conserve esthétiquement une grande fraîcheur et la couleur met en valeur les architectures extérieures ou intérieures des décors.





Godzilla contre King Kong immerge aussi le spectateur nippon de l'époque dans un exotisme qui n'est pas sans rappeler celui des îles hawaïennes ou caribéennes des années 50 pour les américains, avec cette île tropicale lointaine habitée par des sauvages vénérant un Dieu géant. Honda en profite pour les faire danser sur une musique tribale avec des choeurs -évoquant parfois un péplum - censée apaiser King Kong.


Image d'une version remasterisée au Japon pour le blu ray





Le réalisateur nous propose alors quelques scènes qui évoquent Gulliver et son voyage à Lilliput.

En matière d'effets spéciaux, l'utilisation de dioramas, modèles réduits et acteurs en costumes,  sont bien employés et montrent le savoir faire de la Toho pour l'époque.

Une des caractéristiques intéressantes de ce film est qu'il représente encore Godzilla comme une force négative -née de la folie nucléaire-, avant que sa place évolue dans les films suivants. Alors moins populaire au Japon que King Kong, censé représenter le règne animal, le kaiju semble mis en échec :  l'oeuvre s'achève ainsi sur une fin ambiguë, sans "vainqueur".

Le jeu des acteurs en costume appuie cette ligne de conduite : King Kong est humanisé, hésitant quand à son action. Godzilla est plus froid, pas encore anthropomorphisé - comme dans le cas de Godzilla contre Hedora.


En conclusion, j'ai adoré ce film  pour son scénario**** et son esthétique. Il plaira certainement aux amateurs des anciens films du kaïju. 


* la comparaison entre les thématiques du premier et troisième opus mettent vraiment en lumière l'évolution de la société en quelques années. Ainsi du rôle des médias : vecteur vertueux d'information des citoyens dans le premier opus à une omniprésence du divertissement dans le troisième.

** Il en réalisera 8.
*** ce film restera d'ailleurs longtemps dans les annales comme un des plus gros succès en salles de la franchise.
**** En tout cas le scénario est plus consistant que celui de shingodzilla.

mercredi 26 avril 2017

Shin Godzilla (2016) de Hideaki Anno et Shinji Higuchi


Shin godzilla (littéralement "nouveau/néo godzilla"), Aka Godzilla Resurgence, est le dernier film de la Toho sur le kaiju le plus célèbre, co-réalisé par Hideaki Anno ("Monsieur Evangelion") et Shinji Higuchi (qui a participé à Gamera, une autre série de kaiju à succès) en 2016.

Reboot officiel de Godzilla, l'ambition de ce film est de renouveler une licence et de se rapprocher - dans l'esprit au moins - du tout premier opus mais sans la mythologie des fictions successives.

- spoilers éventuels -

Après la première surprise de l'apparition du monstre* et de la réaction initiale des autorités, l'histoire prend la forme  de scènes d'expositions successives : une mise en lumière de la chaine de commandement japonaise, une enquête des scientifiques pour comprendre la nature de leur adversaire, une sorte de reportage de gestion de crise - avec des scènes de tanks, avions, hélicoptères envoyant leurs armes sur un kaiju assez statique, se déplaçant assez peu finalement (c'est assez pratique pour laisser le temps aux véhicules de frapper)-.

Nous assistons à un catalogue des conséquences d'une catastrophe :  un milieu urbain ravagé, forçant les habitants à l'évacuation, des pannes d'électricité gigantesques et des contaminations nucléaires...

Sans doute marqué - trop marqué -par le grand tremblement de terre et l'accident nucléaire de Fukushima, Shin Godzilla en oublie un peu ce qui faisait l'ADN de la franchise.
Il y gagne en froideur, avec la présentation chirurgicale d'une catastrophe jamais vue jusqu'à présent et des moyens , parfois dérisoires, des humains pour y faire face... Avec les défauts inhérents à chaque système organisationnel.
Mais ce film y perd aussi en émotions et son histoire manque d'engagements ou dons de soi en ne suivant pas le parcours intimiste de certains personnages, à l'instar des godzillas traditionnels qui suivaient toujours deux points de vue, le macro (la société face à la catastrophe) et le micro (une famille dans le cours des événements).

A la moitié de l'histoire, l’œuvre échoue à parler de l'universel et se transforme en une célébration patriotique globale de la résistance solitaire du peuple japonais envers et contre tous**.

La réalisation n'est pourtant pas mauvaise et la patte "d'Evangelion" apporte quelques visuels sensationnels. De plus la brochette d'acteurs locaux est impressionnante.

En terme de casting, un reproche pourrait être porté à cette habitude des japonaise dans certaines fictions, lorsqu'ils ont besoin d'un personnage étranger, de prendre un acteur japonais et de le bombarder "nippo-américain" pour plus de commodité linguistique (ici le personnage de Kayoko Ann Patterson). Cela enlève un peu de crédibilité à l'histoire.

En conclusion, je me suis assez ennuyé (particulièrement pendant la première moitié) en regardant cette nouvelle itération, qui tient plus du documentaire catastrophe "déguisé" en film de Godzilla. Les fans du vieux kaiju n'y trouveront peut-être pas leur compte, mais les amateurs de paraboles et d'Evangelion, qui sait ?

A noter que cet opus semble avoir bien marché au Japon et gagné "l'Oscar nippon" du meilleur film. 

Pour un autre son de cloche : ici.


* Un Godzilla qui m'a visuellement assez déçu, en images de synthèses... 
** Avec une petite pique aux américains qui sont prets à lancer une bombe atomique sur Tokyo.

vendredi 14 avril 2017

ghost in the shell : une digestion hollywoodienne en manque de génie



Synopsis : Dans un futur proche, le Major est unique en son genre: humaine sauvée d’un terrible accident, son corps aux capacités cybernétiques lui permet de lutter contre les plus dangereux criminels. Face à une menace d’un nouveau genre qui permet de pirater et de contrôler les esprits, le Major est la seule à pouvoir la combattre. Alors qu’elle s’apprête à affronter ce nouvel ennemi, elle découvre qu’on lui a menti : sa vie n’a pas été sauvée, on la lui a volée. Rien ne l’arrêtera pour comprendre son passé, trouver les responsables et les empêcher de recommencer avec d’autres.

- Attention : quelques spoilers -

Ghost in the shell ou 攻殻機動隊, Kōkaku kidōtai, est une une oeuvre colossale de la SF cyberpunk des années 90 : d'abord un manga (89-97) de Masamune Shirow, puis des déclinaisons animées dont le premier film au cinéma de Mamoru Oshii....Avec ses divers opus, il constitue un univers original mais comportant quelques incohérences toutefois.

J'ai eu l'occasion d'aller voir l'adaptation "live", réalisée par Rupert Sanders en 2017 - à qui l'on doit également Blanche Neige et les chasseurs (une grosse production hollywoodienne standard) -. J'étais assez dubitatif avant de rentrer dans la salle de cinéma, m'interrogeant sur la capacité à matérialiser en cinéma US cette oeuvre colossale de la SF cyberpunk qui fusionne les problématiques d'alors : sociétés hypertechnologiques, éclatement du pouvoir politique, émergence des cyborgs et IA...

Il faut avouer aussi que j'avais été très étonné en découvrant le casting, avec au premier plan Motoko jouée par Scarlett Johansson - la crainte d'y voir un white washing, ne me rassurait pas non plus * -.
J'ai toutefois souri à Takeshi Kitano en vieux badass et apprécié sa présence**, m'évoquant ses anciens rôles de porte flingues... Juliette Binoche n'était pas désagréable non plus.

J'en suis ressorti partagé avec le sentiment d'avoir assisté à une assez bonne digestion hollywoodienne, mais en manque de génie.

D'abord la réalisation, de nature vidéo clipesque, qui achoppe sur la longueur des scènes et créé le plus souvent des vignettes successives sans permettre au spectateur une immersion véritable, ce qui faisait la force du film animé de 1995.

A l'intérieur de ces vignettes, la ville du futur (avec des faux airs de blade runner) est fortement mise en valeur, comme un personnage à elle toute seule... Et parfois trop, en surreprésentation, gâchant encore plus les moments d'immersion nécessaire, comme la scène où Mokoto plonge dans la baie.

Aussi, la présence des interdits hollywoodiens atténue le sens et les thématiques du film. Un exemple : le remplacement du corps nu (en apparence très humain) de Mokoto Kusanagi par une combinaison, dans la première scène d'action. La pruderie en vogue applique ainsi un filtre à une oeuvre géniale, en oubliant le point important : la vision de ce corps nu, très humain en apparence, constituait une représentation symbolique de l'atténuation des frontières entre l'homme et la machine. 



Le film possède également la volonté de prendre en main le spectateur, de lui donner toutes les clés du monde par des textes de mise en contexte ou des explications données par les personnages. L'immersion est encore une fois sacrifiée sur l'autel de la compréhension de tous.

Quant à l'histoire nous retrouvons les inconvénients de cette digestion imparfaite avec un scénario qui semble prendre des éléments des différents opus et impose une vague d'histoire d'amour, ou apporte une vision plus manichéenne des dangers de la technologie (polarité entre excès de la technologie et rebelles). 

Le scénario fonctionne en tout cas, et hors de contexte des oeuvres originales, nous aurions un assez bon film de SF bien formaté grand public : les images sont jolies, le casting joue bien, l'histoire se déroule sans accrocs

Quant au sens de l'oeuvre, le film se détourne du propos de ses prédécesseurs, avec une Mokoto amnésique, obsédée par la recherche de son passé, clé de son identité, lui permettant de définir ce qu'elle est (cadré par deux phrases sentencieuses de Binoche et Kitano), nonobstant son caractère de cyborg.

L'histoire appuie d'ailleurs un rôle d'asservissement donné par la technologie : celui des puissants qui la maitrisent.

A l'opposé, le film d'animation de 1995 se positionnait beaucoup plus dans la recherche de la nature humaine dans ces sociétés hypertechnologiques (la fusion entre l'IA et Mokoto dans cette fiction tiens plus de l'évolution dans la continuité).

Hollywood s'est sans aucun doute mépris sur le sens à apporter aux oeuvres précédentes, peut-être par manque de connaissances du contexte culturel nippon.

C'est qu'au Japon il n'y a pas de rapports hostiles à la technologie (à l'inverse de l'occident) : cela se remarque dans les fictions et légendes et légendes (ici : le golem, l'île du Dr Moreau, le monstre de Frankenstein, terminator, etc...) ou les religions qui influent sur le rapport au monde (le shintoisme, dans lequel toute chose peut receler un kami VS les religions du livre qui opèrent une frontière bien nette entre l'homme et le reste).

En conclusion, si l'adaptation hollywoodienne a échoué à transposer l'âme de l’œuvre originelle, elle constitue une itération formelle simplifiée mais intéressante.

* mais "ce visage" peut trouver une explication avec le scénario.
** Kitano est l'unique acteur parlant en japonais dans tout le film. Cette curiosité n'a pas facilité la séance pour certains amis (japonais).

lundi 6 février 2017

Your name - Kimi no na ha de Makoto Shinkai



Your name (kimi no na ha) est un film d'animation réalisé par Makoto Shinkai en 2016, également auteur de The garden of words, voyage vers Agartha, ou 5 centimètres par seconde...

Tout d'abord, évacuons la comparaison journalistique avec Hayao Miyazaki, celle-ci provenant éventuellement de son succès au box-office (dépassant en chiffres le voyage de Chihiro). Il me semble d'ailleurs que le réalisateur a eu dans son processus créatif le soucis de s'éloigner de ses maîtres encombrants en apportant des touches de "modernité" à son œuvre (aspect visuel ou musical). 
Synopsis (allocine) : Mitsuha, adolescente coincée dans une famille traditionnelle, rêve de quitter ses montagnes natales pour découvrir la vie trépidante de Tokyo. Elle est loin d’imaginer pouvoir vivre l’aventure urbaine dans la peau de… Taki, un jeune lycéen vivant à Tokyo, occupé entre son petit boulot dans un restaurant italien et ses nombreux amis. À travers ses rêves, Mitsuha se voit littéralement propulsée dans la vie du jeune garçon au point qu’elle croit vivre la réalité... Tout bascule lorsqu’elle réalise que Taki rêve également d’une vie dans les montagnes, entouré d’une famille traditionnelle… dans la peau d’une jeune fille ! Une étrange relation s’installe entre leurs deux corps qu’ils accaparent mutuellement. Quel mystère se cache derrière ces rêves étranges qui unissent deux destinées que tout oppose et qui ne se sont jamais rencontrées?

Visuellement, Your name est  influencé par les images vidéos actuelles, notamment avec quelques scènes de time laps de la Ville (sans doute ici pour marquer le passage du temps, lequel a son importance dans le scénario)... Et une obsession certaine des portes automatiques des trains...

Le soin apporté aux détails visuels (une deuxième proximité avec les films du studio Ghibli?) des décors (éléments architecturaux, lieux naturels...) est également à noter, apportant un côté très immersif à l'histoire.

La musique a été confiée - dans cet esprit de modernité ? - à Noda Yojiro, chanteur du groupe japonais de pop-rocks Radwimps*, avec à l'esprit de créer des monologues ou dialogues supplémentaires des personnages de l'histoire. Si les mélodies sans paroles touchent justes, certains des morceaux chantés m'ont parfois semblé entrer en dissonance avec l'histoire. Ce qui est gênant pour un animé par ailleurs immersif...

Quant à l'histoire, l'échange de corps entre un jeune homme et une jeune femme n'est pas un argument uniquement dédié à une intrigue sentimentale impossible entre deux êtres : après la découverte de cet étrange phénomène et quelques scènes montrant la surprise et l'adaptation à la situation, le scénario part dans une nouvelle direction révélant une écriture bien construite.

Your name est aussi pétri d'essence japonaise : cette étrange rencontre entre deux personnes et le lien qui les unit, laquelle me semble être influencée par la légende du Bouvier et de la Tisserande**, ou les liens tissés entre générations successives d'une même famille et le rapport à la nature...

Au final, et malgré quelques défauts, Your name (kimi no na ha) est une oeuvre magnifique, montrant - s'il en était besoin - que l'animation japonaise ne s'arrête pas à la retraite de Miyazaki.


* intéressant groupe de pop rock du main stream japonais (ici : oshakashama)
** légende d'origine chinoise mais, motif très présent dans la fiction japonaise