vendredi 26 mai 2017

La cuillère d'argent, manga de Hiromu Arakawa



Silver Spoon (aka gin no saji) écrit par Hiromu Arakawa
Actuellement : 13 tomes parus (JP ou FR). En cours de publication.

Sans doute mon gros coup de coeur en manga "tranche de vie" depuis longtemps, Gin no saji est une oeuvre qui, sous une forme "innocente", pose avec bienveillance de nombreux questionnements sur le monde agricole.

Yûgo, est le cadet d'une famille au contexte particulier : son père est un homme austère et autoritaire qui mesure tout à l'aune de la réussite scolaire. Après un échec à l'entrée d'un lycée très côté, Yûgo décide d'entrer dans un lycée agricole du fin fond de Hokkaidô pour s'éloigner de la pression familiale et de celle des examens -les deux se confondant un peu -. 

A l'instar d'un candide citadin, il découvrira un monde qu'il ignore et tous ses questionnements et incertitudes : économiques, éthiques et philosophiques... Évitant l'écueil du "sur-place", l'auteur du manga fait évoluer les personnages et leurs relations, en même temps que le passage des saisons(au tome 13 nous sommes déjà en première) et Yûgo, lui même finit par se connaître et trouver le courage de commencer à s'affirmer face à son père.


A noter que l'oeuvre est adaptée en animé et en un film live.

mercredi 10 mai 2017

Instantané : Après la tempête réalisé par Kore Eda Hirokazu





 
Après la tempête (2016 au JP - umi yori ni mo mada fukaku ; encore plus profond que la mer) est le dernier film en date sorti dans nos contrées de mon réalisateur (et scénariste) japonais préféré : Kore Eda Hirokazu. 

Nous retrouvons l'auteur en forme, plus à l'aise dans une oeuvre personnelle qu'avec Notre petite sœur, adaptation d'un manga. 

Dans une approche quasi documentaire, il traite principalement de la famille dans tous ses états et sous divers éclairages, mais avec une bienveillance constante. 

Ici un père de famille irresponsable, joué par le toujours excellent Abe Hiroshi, qui ne gère pas très bien la séparation avec son ex-femme et son fils. La mise en lumière se fait sur les relations compliquées avec un membre d'une famille dont les défauts ne peuvent être pris en modèle.

Au casting nous retrouvons un peu "la famille Kore Eda" avec, en plus d'Abe Hiroshi, Kirin Kiki (également dans still walking...), Lily Franky (tel père, tel fils...)... A noter la présence de Satomi Kobayashi dont c'est -il me semble- la première apparition dans une des oeuvres du réalisateur (elle est connue pour Kamome Shokudo, notamment).

lundi 8 mai 2017

Instantanés mangas 08 Mai 2017

Les instantanés sont de courtes chroniques quand manquent de nombreuses choses dont le temps...



Une vie dans les marges de Yoshihiro TATSUMI (2 tomes imposants), aux exigentes éditions Cornelius, est une autobiographie d'un mangaka, témoignage rare et passionnant de l'évolution de ce genre, de ses techniques, de ses polémiques et de la société toute entière, de la fin de la guerre aux années 60. Il intéressera même les lecteurs plus portés sur l'histoire que le manga.



Dr DMAT (1 à 9 tomes) d'Akio KIKUCHI (dessin) et Hiroshi TAKANO (scénario) aux éditions Kazé relate les aventures d'une équipe mobile d'intervention médicale d'urgence, composée au moins d'un médecin (les secouristes au Japon sont légalement limités dans les soins qu'ils peuvent donner) et dont le but est de se déplacer sur le terrain lors de toute sorte de catastrophe. Bien que je ne sois pas spécialement amateur des séries médicales (mon intérêt s'est limité à deux ou trois saisons d'Urgences il y a fort longtemps), ce manga - avec son lot de pathos est relativement addictif. Il finit toutefois par lasser un peu vers les 3 derniers tomes.

dimanche 7 mai 2017

King kong contre godzilla (1962)



King Kong contre godzilla, sort en 1962 dans les salles japonaises dans un contexte bien différent du premier opus (1954*)  : avec une croissance économique favorable (jimmu boom 56-57, iwato boom 59-63), la reconstruction du Japon est achevée et le pays se prépare à recevoir les jeux olympiques dans quelques années (1964).

Pendant cette période, l'heure est à l'optimisme et la société japonaise autant que son paysage urbain, va être profondément modifiée avec pèle mêle la (re)découverte de la consommation et des médias, ce qui va influencer Honda Ishirô, de nouveau aux commandes de la réalisation du troisième opus de la franchise**.

A l'occasion du premier film en couleur du kaiju, Godzilla affronte King Kong, dont les droits d'utilisation ont été achetés par la Tōhō à la RKO Pictures***.

Honda continue de tracer ce qui fera l'ADN de la licence, avec une critique sociale et ce mélange de points de vues micro et macro alternés ou la difficile résistance humaine face à des forces qui dépassent l'entendement.

A cette époque, le Japon a pris de l'ampleur et les médias aussi. Ce qui est important est d'être amusant, intéressant, original, pour avoir un bon taux d'audience. Si l'audience suit, les sponsors suivront.. 

- Attention spoilers-
La première scène s'ouvre ainsi sur une émission scientifique sponsorisée par une société, "Pacific Pharmaceutics", dont le producteur déplore la baisse d'audimat (générant l'argent des réclames, fondement de la consommation).
Bien vite, le présentateur fait part de l'observation par un sous marin américain d'un phénomène étrange en Antarctique...

Une autre scène dévoile un repas en famille... Le Japon est tout à son bonheur retrouvé et son insouciance... Les gens sont désœuvrés et l'effroi se regarde par la petite lucarne : ainsi la scène de transition avec le tigre dans la TV est un régal.




Mais l'avidité va encore une fois faire courir le Japon (et le monde) à sa perte : cette course à l'audimat  incite le sponsor à financer une expédition TV vers l'océan indien, pour du sensationnel, suite à la rumeur de l'existence d'un animal géant.

Image d'une version remasterisée au Japon pour le blu ray

Et bientôt va émerger l'idée de mettre en présence les deux monstres sacrés... sans envisager que tout puisse mal tourner...

Sur un scénario plutôt intelligent dans son genre, le film conserve esthétiquement une grande fraîcheur et la couleur met en valeur les architectures extérieures ou intérieures des décors.





Godzilla contre King Kong immerge aussi le spectateur nippon de l'époque dans un exotisme qui n'est pas sans rappeler celui des îles hawaïennes ou caribéennes des années 50 pour les américains, avec cette île tropicale lointaine habitée par des sauvages vénérant un Dieu géant. Honda en profite pour les faire danser sur une musique tribale avec des choeurs -évoquant parfois un péplum - censée apaiser King Kong.


Image d'une version remasterisée au Japon pour le blu ray





Le réalisateur nous propose alors quelques scènes qui évoquent Gulliver et son voyage à Lilliput.

En matière d'effets spéciaux, l'utilisation de dioramas, modèles réduits et acteurs en costumes,  sont bien employés et montrent le savoir faire de la Toho pour l'époque.

Une des caractéristiques intéressantes de ce film est qu'il représente encore Godzilla comme une force négative -née de la folie nucléaire-, avant que sa place évolue dans les films suivants. Alors moins populaire au Japon que King Kong, censé représenter le règne animal, le kaiju semble mis en échec :  l'oeuvre s'achève ainsi sur une fin ambiguë, sans "vainqueur".

Le jeu des acteurs en costume appuie cette ligne de conduite : King Kong est humanisé, hésitant quand à son action. Godzilla est plus froid, pas encore anthropomorphisé - comme dans le cas de Godzilla contre Hedora.


En conclusion, j'ai adoré ce film  pour son scénario**** et son esthétique. Il plaira certainement aux amateurs des anciens films du kaïju. 


* la comparaison entre les thématiques du premier et troisième opus mettent vraiment en lumière l'évolution de la société en quelques années. Ainsi du rôle des médias : vecteur vertueux d'information des citoyens dans le premier opus à une omniprésence du divertissement dans le troisième.

** Il en réalisera 8.
*** ce film restera d'ailleurs longtemps dans les annales comme un des plus gros succès en salles de la franchise.
**** En tout cas le scénario est plus consistant que celui de shingodzilla.