# De Murakami Haruki
L'œuvre de Murakami Haruki est à la fois
aisée à identifier et difficile à analyser en raison du style si
particulier de son univers.
En remarque liminaire, le lecteur
français ne devra pas le confondre avec Murakami Ryû, un écrivain bien
différent au ton plus "trash".
L'œuvre de Haruki pourrait être séparée
schématiquement en deux tendances, l'une réaliste et l'autre
fantastique.Cependant, lorsque l'on y regarde plus près, elle reste
étonnamment homogène et tend systématiquement vers le réenchantement du
quotidien : chaque histoire est traversée par la survenance de faits
étranges ou absurdes, dont certains pourront se raccrocher à un univers
"réaliste" et d'autres pas, la faisant basculer dans le fantastique.
En un sens, la solitude apparaît comme
l'un des thèmes majeurs de Murakami : la maturité apporte à l'homme la
prise de conscience de son univers intérieur et l'impossibilité de
comprendre totalement l'autre. Cette révélation suscite un sentiment de
solitude, lequel n'est pas forcément triste et représente une condition
de "réalisation de soi" (µ).
"C'est la solitude. Mais cela
n'a rien de triste. Il existe tellement de formes diverses de solitude.
Il y a la solitude pénible, triste, qui vous déchire les nerfs. Et il y a
des solitudes d'une nature différente. Il faut tailler dans sa propre
chair pour découvrir ça. Mais si l'on fait l'effort nécessaire, on est
récompensé dans la même proportion." (*)
Le comportement d'autrui peut donc nous
apparaitre absurde, voir étrange. Ainsi, tout n'est qu'une question de
regard pour glisser du monde de la "normalité" à celui de "l'absurde"
voir du fantastique.
Enfin, Murakami Haruki, c'est aussi la
présence importante de la musique dans son œuvre : La musique influe
fortement sur l'ambiance particulière qui se dégage de ses textes. es
personnages, souvent mélomanes, sont imprégnés de musique - le jazz,
souvent, le rock et le classique. Les auteurs sont cités, si ce n'est le
titre des morceaux.
# L'éléphant s'évapore
Quatrième de couverture = Une
curieuse digression sur les kangourous. Un éléphant qui se volatilise.
Un nain diabolique qui danse. Ou une jeune fille " cent pour cent
parfaite ". A travers ces dix-sept nouvelles, petits contes anodins de
notre quotidien, Haruki Murakami entraîne son lecteur dans une dimension
parallèle à l'imaginaire délicieusement drôle et bizarre, au fil d'un
Japon nostalgique et moderne à la fois. Farouchement zen et férocement
fantastique, l'auteur déploie encore une fois son art magistral, et nous
montre qu'il sait comme personne comment transfigurer la banalité de
nos existences.
Le recueil est une compilation de
nouvelles opérée par l'éditeur américain de l'auteur. La version
française le reprend in-extenso avec une nouvelle traduction du japonais
par Corinne Atlan. Le choix de textes assez inégaux et disparates est
quelque peu malheureux.
A noter toutefois quelques textes intéressants tel que :
- L'oiseau à ressort et les femmes du mardi (ねじまき鳥と火曜日の女たち)
- La seconde attaque de boulangerie (パン屋再襲撃)
- La chute de l'Empire romain, la révolte indienne de 1881, l'invasion de la Pologne par Hitler, et le monde des vents violents (ローマ帝国の崩壊・一八八一年のインディアン蜂起・ヒットラーのポーランド侵入・そして強風世界)
- Les Lederhosen (レーダーホーゼン)
- Les granges brûlées (納屋を焼く)
- Family Affair (ファミリー・アフェア)
- Le nain qui danse (踊る小人)
- La dernière pelouse de l'après-midi (午後の最後の芝生)
- Le silence (沈黙)
- L'éléphant s'évapore (象の消滅)
Le nain qui danse (une histoire de
possession) et l'éléphant s'évapore (une disparition inexplicable)
virent clairement dans le fantastique. D'autres nouvelles tel que la
seconde attaque de boulangerie penchent vers l'inexplicable.
Les autres nouvelles sont plus décevantes :
- Le communiqué du kangourou (カンガルー通信)
- À propos de ma rencontre avec la fille cent pour cent parfaite par un beau matin d'avril (四月のある晴れた朝に100パーセントの女の子に出会うことについて)
- Sommeil (眠り)
- Le monstre vert (緑色の獣)
- La fenêtre (窓)
- TV People (TVピープル)
- Un cargo pour la Chine (中国行きのスロウ・ボート)
Pour qui ? Pour un amateur déjà
convaincu de Murakami Haruki. Pour le primo-lecteur, la lecture du
recueil "après le tremblement de terre" sera plus judicieuse.
(ù) voir à ce sujet Kafka sur le rivage.
(*) Nouvelle le silence du recueil "L'éléphant s'évapore".