En matière de haïkus japonais, Kaneko Tôta fut sans doute l'auteur contemporain le plus important, traversant le vingtième siècle, et ses diverses évolutions esthétiques nippones (1).
Au-delà
de son activité de haïjin, il tira de son expérience de la guerre les
fondements de sa volonté de résistance à l'iniquité et de son engagement
en société : syndicaliste pendant sa vie professionnelle, il apporta
notamment son soutien aux mouvements pacifistes et de lutte contre le
nucléaire après l'accident de Fukushima.
Naturellement, il calligraphia le slogan de ralliement des mouvements de protestations actuels "Abe seiji wo yurusanai" :
(lors d'un voyage en septembre 2017 - Nakano, quartier de Tokyo)
Ce
sont les événements de ces dernières années qui l'incitèrent à rédiger
et publier ses mémoires en 2016, sans doute avec la motivation de
transmettre par son expérience cet esprit de résistance face aux
résurgences des démons de la société japonaise.
Le livre "Cet été-là j'étais soldat", traduit par Laurent Mabesoone (un de ses disciples) et publié par les éditions Pippa en 2018, est ainsi une porte ouverte sur la vie et l'oeuvre de cet auteur encore méconnu en France et pourtant essentiel.
Enrichie
de cartes, photos, d'un glossaire et d'un index de noms et prénoms,
l'édition est didactique autant que possible et présente quelques haïkus
du maître en japonais en caractères imprimés (et non les difficilement
lisibles calligraphies pour un apprenant du japonais lambda), puis
romajis (pour la musicalité du texte) avant sa traduction. Ce qui est un
point essentiel selon moi pour une bonne édition de haïkus.
J'éprouve cependant un léger regret avec le caractère partiel de cette biographie (j'aurais apprécié une édition complète).
Je conclurai cette brève chronique avec un extrait des 40 haïkus de ces dernières années :
雪積めど放射能あり流離かな
Yuki tsumedo hôshanô ari ryûri kana
Sous la neige,
Toujours là, la radioactivité.
Exode.
(1)
Personnellement, son livre de haïkus pour débutants "haiku nyûmon" (en
japonais) m'accompagne depuis longtemps dans ma pratique de composition.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire