Grâce à un ami, j'ai pu visionner les documentaires d'Imamura Shohei "En suivant ces soldats qui ne sont pas revenus"....未帰還兵を追って (mikikanhei wo otte)
Le DVD1*, distribué par Baba Yaga films, contient les documentaires suivants :
- En suivant ces soldats qui ne sont pas revenus - Malaisie N°1 (1971) ;
- En suivant ces soldats qui ne sont pas revenus - Thaïlande N°2 (1971) ;
- La brute revient au pays natal (1973).
A
l'époque, ces documentaires ont un ton bien différent de ce qui
pourrait être tourné aujourd'hui dans l'archipel et le premier commence
en établissant clairement la responsabilité du Japon dans la seconde
guerre mondiale.
D'un
point de vue de technique documentaire : la caméra saute et oscille.
Cela peut-être la qualité des stabilisateurs de l'époque.
On
peut parfois se demander si l'obsession de certaines émissions de
variété japonaises à chercher des compatriotes dans le monde entier pour
savoir ce qu'ils sont devenus, serait venu de ces documentaires
d'Imamura Shohei.
Dans
ces émissions de variété moderne, le ton est léger et là pour renforcer
deux messages : qu'il est bon d'être au Japon par rapport à la vie
difficile à l'étranger et mettre en exemplarité les vertus japonaises
dans un contexte extérieur.
Quant
à Imamura, la démarche est à l'époque plus forte, dérangeante, même. En
effet dans une société de la communication non verbale et du consensus,
à une époque où les japonais souhaitaient effacer une partie de leur
passé, le réalisateur met les pieds dans le plat, pour réactiver une
forme de mémoire.... C'est que l'époque est contestataire (la jeunesse
se révolte, refuse l'alliance avec les USA, est contre la guerre du Viet
Nam...) et Imamumra cherche à comprendre et faire comprendre ce passé
guerrier du Japon. Le mettre en contexte : il va donc chercher ces
soldats non rentrés au Japon, ceux qui n'ont pas subi l'évolution de ce
pays.
Le
réalisateur se fait le témoin direct dans ce documentaire : il apparaît
à l'écran. Et n'hésite pas à faire un tour dans les clubs louches pour
trouver la veuve d'un ancien soldat japonais dans le premier
documentaire (N°1 - La Malaisie).
Au
détour de ses recherches il arrive à interviewer plusieurs personnes
dont un ancien militaire converti à l'islam en Malaisie, qui s'interroge
sur la pertinence du pouvoir au Japon, le sens de la guerre passée, de
l'endoctrinement. Ainsi le documentaire est traversé de thèmes de
science politiques (des thèmes que l'on ne verrait pas de nos jours).
Imamura poursuit son travail avec le deuxième documentaire et part avec son équipe en Thaïlande pour "interroger
des soldats japonais non-rapatriés, au sujet de leurs expériences, pour
appréhender cette guerre, trop souvent oubliée en temps de paix, dans
sa réalité et dans toute son horreur."
Et
naturellement, cette vérité que l'on croit tue, apparaît naturellement
de la bouche de ces anciens soldats - de gré ou de force - et leurs
souffrances. Dans l'alcool, les esprits s'échauffent, les démons
resurgissent du passé. Les officiers et leurs folies. Les horreurs.
Celles qui ont été vues. Ou commises. Et parfois les soldats sont
également leurs pires ennemis dans leur sauvagerie. Certains propos font
froid dans le dos et d'autres redonnent foi en l'humanité.
L'un
est prêt à reprendre les armes, l'autre ne parle plus que thaïlandais.
Par choix ? De la bouche du troisième la conscience, le refus d'exécuter
l'inhumain : "les ordres il faut réfléchir avant de les exécuter".
"Vous
pouvez êtres ouvriers ou paysans, mais vivez comme des hommes. Les plus
grands hommes ne sont pas forcément des premiers ministres. Les plus
braves sont ceux qui ont vécu humainement" disait son professeur.
On
parle de l'empereur : l'un n'a pas assez de mots (négatifs) pour dire
ce qu'il en pense et l'autre a toujours celui-ci dans son coeur.
Dans le troisième documentaire "la brute revient au pays natal", Imamura fait rentrer l'un des anciens soldats au Japon, pour le confronter à la société, son évolution et ses oublis : la "brute" rentre au pays et reprend contact avec sa famille. Il découvre pourquoi et par qui il a été déclaré mort. Des frictions naissent : les anciens soldats n'ont plus leur place dans le Japon moderne des années 70 et sa course à la prospérité.
Dans le troisième documentaire "la brute revient au pays natal", Imamura fait rentrer l'un des anciens soldats au Japon, pour le confronter à la société, son évolution et ses oublis : la "brute" rentre au pays et reprend contact avec sa famille. Il découvre pourquoi et par qui il a été déclaré mort. Des frictions naissent : les anciens soldats n'ont plus leur place dans le Japon moderne des années 70 et sa course à la prospérité.
Au
final, en suivant ces soldats qui ne sont pas revenus : des documents
"claque dans la gueule", salutaires qui interrogent un Japon pas si
monolithique que cela.
*Le DVD2 sera chroniqué séparément ou cette chronique sera mise à jour ultérieurement.