lundi 28 mars 2016

brève : BT'X , Saint Seiya varation


Synopsis (wiki) : Teppei et Kotaro sont deux frères orphelins. Kotaro, l'aîné, est doté d'une intelligence incroyable. Un jour il décide de partir parfaire son instruction à Berlin, laissant seul son frère sur leur île natale. Peu de temps après Teppei encore enfant rencontre une femme blessée du nom de Karen. Elle est arrivée sur l'île pour se réfugier car elle était poursuivie par la Mechanicae Imperium. Teppei va l'aider à échapper à ses poursuivants. Karen voudra le laisser seul mourant, mais elle l'aidera et l'entraînera pour qu'il soit plus fort. Des années plus tard Teppei et Kotaro se retrouveront. Malheureusement ce bonheur ne sera que de courte durée car Kotaro se fera enlever par la Mechanicae Imperium, une organisation aspirant à dominer le monde grâce à une armée de B't (robots mi-mécanique mi-biologique). Teppei va alors tout faire pour sauver son frère, notamment à l'aide de X, un B't légendaire revenu à la vie grâce au sang de Teppei et à l'aide des trois autres B't légendaires.

Masami Kurumada est un mangaka connu pour avoir été l'auteur de Saint Seiya, autrement dit, les chevaliers du Zodiac, dont l'adaptation animée avait rythmé notre jeunesse. Il y aurait beaucoup à dire, notamment pour le côté Yayoi de l'animé etc...Mais cela ne sera pas le sujet de cette brève. 

Ayant un peu de temps à meubler, j'ai visionné, parfois en accéléré, l'adaptation animée de BT'X, adapté du manga éponyme.
Bien moins drôle ou tendancieux que Saint Seiya, BT'X en conserve quelques similitudes : d'un côté un graphisme similaire (des héros en armures montant des robots ressemblant à des créatures parfois mythologiques) et des péripéties simplistes dans le genre shônen - nekketsu : une épreuve, un boss à abattre, un truc à apprendre...
Non dénué de qualités, il surprendra peut-être même les amateurs de Kurumada (dont je ne fais pas partie) : un scénario qui emprunte à l'héroïc fantasy classique avec une menace cataclysmique qui nous pend au nez et que les personnages n'avaient pas vu venir... Kurumada est bien inspiré quand il emprunte à Leiji Matsumoto ses interrogations sur l'immortalité (et la place qui reste à notre humanité dans un corps mécanique).

Le seul espoir ? Un garçon un peu idiot mais bouillonnant qui possède la cosmo énergie, euh non, un morceau de soleil en lui (cherchez pas, il y a sans doute une dimension prophétique à tout cela mais il y a peu d'explications : le back ground est assez peu esquissé). Ce garçon décidera de voyager en ligne droite et "poutrer" tous ses ennemis pour atteindre la forteresse noir et sauver son frère (les héros de Kurumada n'ont jamais de temps à perdre avec les raisonnements tactiques).

Au-delà de tout ça, une  bonne bande sonore, épique, composée par Akira Senju.

Au final, on passe un bon moment à rigoler (un peu moins qu'avec Saint Seiya quand même) avec quelques bonnes idées de technofantasy.

mardi 15 mars 2016

Le rire "littéraire" au Japon



Poursuivons notre tour du rire au Japon après la présentation de l'humour télévisuel en remontant plus loin avec le kyogen et le senryu, genres plus littéraires.

I- Kyogen

A- Le kyogen, qu'est-ce que c'est?

Le kyogen (kyo: folie; gen: parole; "la parole folle") est le théâtre comique japonais traditionnel. Il est comparable aux farces et fabliaux du moyen age et aurait pris sa forme définitive à l'époque Muromachi (14e - 16e siècle). A l'origine, les représentations de kyogen se déroulaient pendant l'intermède entre 2 pièces de nô.


B- Références de livre

Kyogen de Kunjiro Handa & Mieko Matsumoto aux éditions "L'arbre de Jessé", présente plusieurs pièces.

C- Où voir du Kyogen?

Il est très rare de pouvoir trouver des Kyogen à Paris, mais si l'occasion se présente, n'hésitez pas: en avril 2004 j'ai ainsi eu l'occasion d'assister à une pièce de la troupe Shigeyama à l'Espace Cardin. C'était très intéressant (pour les costumes, le jeux des acteurs, etc...). Cette troupe est également revenue à Paris le 11 septembre 2008.
Sinon, à l'occasion d'un voyage au Japon : en allant voir une pièce de noh,  on peut bénéficier d'une représentation de kyogen avant...

II- Senryu

Le Senryu est souvent présenté comme un haïku satirique: il a 17 pieds (répartis librement) et comporte un effet humoristique. Le poète Karaï Masamichi Hachiemon, dit "Karaï Senryû" (18e siècle) est considéré comme le père du genre.

A- les thèmes du Senryu et quelques exemples

(a) La satyre sociale :

"Ayant épousé un laideron en forme de botamochi (gâteau japonais), un homme a pris la dot et peut négliger son épouse" nous dit Maurice Coyaud en citant une composition d'un livre de Jean Chollet :

botamochi wo
kutta de kubi ga
mawaruya

Il a mangé le botamochi
Maintenant il peut
tourner la tête


(b) Un côté grivois :

shinitai
no ni no ji wo nuite
hoshii kafu

la veuve voudrait
qu'on enleva le ni de
shinitai.


La veuve dont il est question prétend qu'elle veut mourir (shinitai) à la suite de son mari, alors qu'elle veut b...### (si l'on enlève ni à shinitai, il devient shitai, cad "b...###)

(c) et d'autres :

la scatologie (avec modération selon senryu), la critique politique, le rire "classique ...


Pour Philippe Costa, le senryu, par son esprit frondeur, satirique et gaulois, pourrait être promis à un bel avenir et devrait trouver son public en France [*]. On peut cependant rester réservé sur ce pronostic : les personnes qui ont de l'esprit ici pourraient avoir besoin d'une place importante pour donner toute la mesure de leur ironie (égo?).


B- Références de livres

- Maurice Coyaud [Tanka, haiku, renga - le triangle magique aux Ed. les Belles Lettres] [a]
- Jean Cholley [un haïku satirique - le senryu aux publications orientales de france] [b]
- Philippe Costa [Petit manuel pour écrire des haïku aux Editions Philippe Picquier] [*]

Article présenté autrefois sur tabi.over-blog le 17 septembre 2008

lundi 14 mars 2016

Le rire en langue étrangère et le Japon



La capacité à comprendre et communiquer dans une langue étrangère est un élément essentiel à l’atténuation de sa position d’étranger.

La compréhension de l’humour issu de la culture de l'autre participe de cet apprentissage et va plus loin que la simple communication : être capable de rire ensemble relève bien d’une forme de partage.
Penchons nous sur le rire et ses formes avec le théâtre de Molière et les travaux de Bergson.

Sur le rire :

[1] Molière, en matière de théâtre comique, renouvelle le genre en France au 17e siècle en synthétisant deux courants : l'un suscite un rire "gratuit "(le seul désir est de faire rire en présentant une image caricaturale du monde) et l'autre un rire "utilitaire" (par le désir de corriger les mœurs par une peinture fidèle des travers de l'homme).

[2] Chez Bergson (1859-1941), le rire fait partie du propre de l'homme (l'animal ne rit pas), montre une certaine forme d'insensibilité (l'empathie, la pitié pour l'objet du rire l'empêche de naître) et se développe au sein d'une conscience commune (le rire est donc connoté socialement et culturellement => Certains effets comiques sont intraduisibles car relatifs aux mœurs et idées d'une société particulière).


Les différents types de rire :


[1] En matière de théâtre plusieurs comiques (que l'on retrouve chez Molière) peuvent être décelés :
- le comique de caractère (personnalité et manières d'un personnage);
- le comique de situation (situation incongrue, paradoxale: quiproquos, malentendus, conjonctions d'événements);
- le comique de jeux de mots;
- le comique de gestes (coups, chutes, grimaces..);
- le comique de mœurs (celui-ci servant à souligner les tendances d'une époque).

[2] Pour Bergson , le rire (provoqué par le comique) est le placage du mécanique sur du vivant. Il est suscité dans la société à l'encontre des personnes qui s'écartent de la norme.

Il envisage le comique d'action (enchaînement machinal qui prête à rire) et de situation (la situation générale est génératrice du rire : quiproquo, imbroglio...). Ces comiques ont pour fondement 3 ressorts : la répétition (d'une action qui en devient drôle: rencontrer 3 fois une personne pas vue depuis longtemps), l'inversion (inverser les rôles: le prévenu fait la morale au juge) et l'interférence des séries (série d'événements allant contre la logique: quiproquos, etc..).


Le rire et les différences culturelles :

Les différences culturelles créent-elles une barrière totalement hermétique à l'humour? La réponse devrait être nuancée. Certaines formes d'humour restent inaccessibles : le rire peut être suscité par des procédés dont la compréhension est nécessaire (par l'apprentissage de la langue) et favorisé par l'éducation dans un environnement (qui rend réceptif à certaines formes d'humour). Avoir grandit dans une société différente atténue l'effet des situations comiques, mais l'apprentissage linguistique et culturel l'améliore.

Ainsi, l'auteur du blog intimmigration voit dans la capacité à rire ensemble des mêmes choses une phase ultime (idéale) de l'immersion intégrale [1].

En mettant de côté l'aspect "environnemental" du rire, nous pourrions ainsi distinguer des formes de rires selon leur degré d'universalité :

- Un rire universel ne nécessitant pas l'apprentissage d'une langue :
En font partie, les comiques de gestes (glisser sur une peau de banane, faire des grimaces) & - dans une moindre mesure - le comique de situation, si celle -ci est claire (le policier de proximité qui songe à garder pour lui un portefeuille).

- Un rire connoté culturellement, nécessitant des bases dans la langue et la culture de l'autre :
Le comique de caractère et de situation (lorsque celles-ci sont complexes).

- Un rire fortement connoté culturellement, nécessitant de bonnes connaissances de la langue et la culture :
Le comique de jeux de mots et de mœurs, qui nécessitent une compréhension certaine de la société en question.

Rire ensemble reste possible, prend du temps et rencontre quelques limites.

Le rire au Japon :

Parler des genres humoristiques au Japon est un sujet vaste. Nous nous contenterons de présenter quelques auteurs du comique audiovisuel.

1- Drifters


La vidéo: un restaurant de Ramen tenu par un transformiste un peu spécial, qui ne vend qe des nouilles instantanées et boit avec les clients...

Les auteurs : Ce sketch très amusant est "commis" par les "drifters" un groupe de comiques des années 70 à  80, connus notamment pour l'émission "Hachijidayo, Zen'inshugo! (Il est 8 heures, venez tous ensembles!). Dans leurs émissions, ils proposaient un certain nombre de sketchs sur des situations diverses, à l'instar du petit théâtre de bouvard ou de benny hill (mais sans les poursuites).

2- Takeshi Kitano


Il commencera sa carrière humoristique dans un manzai avec Kiyoshi Kaneko (genre particulier de comique japonais, composé de duos exécutant des improvisations assez satiriques) avant d'apparaître seul à la TV en tant qu'animateur, et producteur d'émissions populaires. Un exemple de jeu télévisé humoristique et conçu par lui est "takeshi's castle" (86-89), actuellement diffusé sur W9.

3- Les Ramen's

Les ramen's (du nom de nouilles japonaises) ont parfois un côté monthy pythons avec une absurdité comique très présente dans leurs sketchs. Ils se jouent de la façon dont leur culture présente ses traditions et du regard que portent les étrangers sur celle-ci. Avec un humour satyrique certain, on peut se demander s'ils rencontrent vraiment le succès chez eux. Nul n'est prophète en son pays.

L'établissement de sushi (sous-titres anglais) :

Et la cérémonie du thé :

[1] intéressant blog, malheureusement disparu, mais vous trouverez sa trace sur archive.org ICI.

Article publié la première fois le 06/08/2008 sur le blog tabi.